"il n’est pas question de livrer le monde aux assassins d’aube" (Aimé Césaire)

"il n’est pas question de livrer le monde aux assassins d’aube" (Aimé Césaire)

dimanche 23 février 2014

Boubou (Hors clichés)De l’art de combattre avec grâce



Pour dévoiler la hideur du racisme, je me suis servi de la beauté du boubou
Pour dénoncer la bestialité du racisme, je me suis appuyé sur l’élégance du boubou
Pour révéler le racisme ordinaire, j’ai donné à voir la noblesse naturelle du boubou


Je vous offre ici quelques extraits de mon livre, Boubou (Hors clichés).
Une contribution dans la lutte contre des préjugés qui font mur.


A commander sur http://www.parolestissees.com

Extrait 1
Parce que j’ai vu une France où le racisme allait de plus en plus loin, parce que j’ai vu que ce racisme est un esprit qui baignait dans du formol, parce que j’ai vu que cette conservation finissait par faire pousser la laine de la haine, parce que j’ai vu que cette laine donnait froid dans le dos, parce que j’ai vu que ce froid poussait à tricoter une méchante histoire, parce que j’ai vu que cette histoire créait une grande illusion, parce que j’ai vu que cette illusion provoquait la nudité du roi, parce que j’ai vu que cette nudité engendrait des silences, parce que j’ai vu que ces silences se faisaient complices de l’indécence, parce que j’ai vu que cette indécence débouchait sur l’inadmissible, je ne pouvais plus me taire. Avec une plume et un appareil photo, avec mes outils dérisoires, avec mes outils de dérision, j’ai décidé de parler, témoigner.

Extrait 2
C’est à des proverbes africains que je dois une bonne partie de mes anticorps. Ces concentrés de philosophie ne m’empêchent pas de boire à la source de la Fontaine ou de Montaigne. Bien au contraire, ils m’amènent à tisser des alliances. Petite, je me sens grande dans l’esprit du boubou, boubou qui franchit allègrement la barre de «lidentité racine unique». Comme condition de dialogue, si des Français exigeaient de moi une desquamation jusqu’à la déchirure de la berceuse qui dort sous ma peau, alors je leur rirais au nez. Au nom de l’intégration, je ne laisserai pas appauvrir ma terre intérieure, laver le limon de mes identités. Et si j’aime le boubou, je sais que je le rejetterai s’il devenait chape de plomb entravant les papilles de mon être. Je suis pour cette identité que Césaire présentait comme « identité non pas archaïsante dévoreuse de soi-même, mais dévorante du monde » Servir à mon oreille l’histoire contée par la flûte peule, offrir à ma salive les suavités d’un yakitori, tremper mes lèvres dans la coupe de Baudelaire, inviter dans l’allée du jardin la bise bleue de Chefchaouen, fuguer sur l’aile étoilée de Brel, boire la voix cristalline de Bella Bellow, siroter le souffle de Miles, basculer dans l’ivresse des chœurs de keur Moussa, onduler dans la nitescence des mondes de Chagall et tourner, tel Rûmî, autour des œuvres-planètes…

Extrait 3

J’aime le boubou qui s’ouvre comme une fenêtre
Qui s’ouvre pour voir, non épier dans l’œil de Judas
Qui s’ouvre pour ouïr, non espionner tel un renégat
Copyright Paroles Tissées Éditions
Qui s’ouvre pour comprendre, non pour rafler la mise
Qui s’ouvre pour communier, non pour parer à l’équité

J’aime le boubou qui s’ouvre comme une fenêtre
Qui s’ouvre aux étoiles comme une ode argentine
Qui s’ouvre au nom de la raison et de l’amour vaillant
Qui s’ouvre au nom du rêve et de l’inépuisable beauté
Qui s’ouvre au nom de la vraie dignité et de la pure vérité

J’aime le boubou qui s’ouvre comme une fenêtre
Qui s’ouvre pour aider le funambule à défier le vide
Qui s’ouvre pour aider l’être engagé sur le fil de la vie
Qui s’ouvre pour aider l’être allant de fenêtre en fenêtre
Qui s’ouvre pour aider l’être nageant vers son grand être
Mariama Samba Baldé